Temps de partage à Troyes

Lors de notre rencontre de cet après-midi au temple protestant de Troyes, nous aurons un temps de partage.
Il me tenait à coeur de mettre à votre disposition le document que je distribuerai à cette occasion.

Le voici: Pour partager  (cliquez sur ce lien puis sur le texte en bleu juste en dessous du titre dans la page qui s’ouvrira)

Merci encore à Joëlle Wetzstein, pasteure de l’église protestante unie de Troyes et de l’Aube, ainsi qu’à Géraldine Roux, Directrice de l’Institut Universitaire Européen Rachi, pour leur accueil merveilleux, ainsi qu’à toutes les intervenantes et à tous ceux qui s’impliquent au quotidien pour faire exister des liens de fraternité, de sororité et de dialogue.

Qui devons-nous devenir ?

Je profite des vacances pour partager l’article que j’ai écrit pour le magazine l’appel à la rentrée. Bonne lecture.

Comment redéfinir notre identité et notre rapport au monde ?

La responsabilité collective de l’humanité est jugée en ce début d’année

 

Qu’est-ce que le judaïsme ? La question du « vrai israël » a agité les débuts de la chrétienté comme la naissance de l’Islam. Elle soulève d’ailleurs des remous au sein même du peuple juif. Mais il est trop réducteur de limiter la question à une revendication d’héritage. Le judaïsme n’est pas un objet défini mais un sujet en lui-même qui émerge sans cesse de la confrontation du peuple juif à l’histoire. Il n’est pas exact de dire que « le Judaïsme est la plus ancienne des trois religions monothéistes ». S’il est apparu antérieurement, sa forme actuelle est moderne au même titre que les formes modernes des autres religions.

Edmond Fleg s’exprime ainsi : « Israël n’est pas créé, les hommes le créent ». C’est sans doute pour cela que la Michna rappelle, « l’étude de la Torah équivaut à tous les autres commandements ». L’éducation permanente soutient effectivement l’évolution permanente. Fleg s’inscrit dans la continuité d’une tradition talmudique qui considère que l’homme peut dépasser Dieu, avec son assentiment, et rire de voir le triomphe de ses enfants.

 

Devenir Israël

Israël en tant qu’entité est symbolisé dans la bible par le personnage de Jacob. Il faudra que Jacob lutte avec Dieu lui-même pour obtenir un nom nouveau et de nouvelles qualités, une bénédiction renouvelée. « Celui qui contourne » deviendra « celui qui domine Dieu ».  Ce n’est pas pour des raisons d’héritage génétique ou culturel que Jacob est « élu ». C’est parce que, comme le dit Léo Baeck, il « se choisit lui-même », et lorsqu’il entre en combat, il interroge son attaquant : « dis-moi ton nom » et le retient jusqu’à l’épuisement.

Ceci est vrai au niveau collectif autant qu’au niveau personnel. Les religions, les peuples, les états, les associations, luttent pour trouver leur chemin autant que chacun d’entre nous, à un niveau personnel. En fin de compte, c’est à nous de prendre acte de ce que nous sommes devenus, et de signer nous-mêmes le registre de la vie ainsi que le rappelle la liturgie de Kipour, « jour du grand pardon ».

En ce jour solennel, nous ne luttons pas avec les anges, mais nous faisons mieux encore puisque nous devenons des anges. Habillés de blanc, soustraits à nos besoins nutritionnels, nous prononçons à voix haute la réponse que seules les légions célestes adressent à l’Eternel. Nous considérons en ces jours solennels que nous amender est de la toute première urgence, une question de vie ou de mort.

 

Ne pas devenir Rav Soussia

Pour nous changer nous-mêmes, il nous faut presque créer un autre moi qui enseignerait au moi présent comment devenir un moi renouvelé. Les fêtes de Tishri jouent ce rôle et nous invitent à faire retour sur nous-mêmes, à prier et à crier, à nous tourner généreusement vers les autres.

Ici encore, tout est question de mesure. Yom Kipour fait monter la tension, mais Roch hachana nous y a préparés, et SimHat Torah vient en faire la catharsis. L’idée n’est pas pour nous de devenir des surhommes nietzschéens, mais simplement d’accomplir nos capacités et de les orienter. C’est un « deviens ce que tu es » sans violence, qui rejoint l’enseignement de notre cher Rav Soussia du légendaire Hassidique. Il sait que lorsqu’il rendra des comptes sur l’usage qu’il aura fait de sa vie, il ne sera pas jugé à l’aune d’Abraham ou de Moïse, mais à la sienne propre, à celle de Rav Soussia.

Que doivent être nos vies ? Viktor Frankel, neurologue, psychiatre, rescapé d’Auschwitz et fondateur de la logothérapie, invite ses patients à ne pas chercher le sens de la vie en tant que tel, dans son essence, mais à chercher au contraire le sens de leur vie propre dans leur propre volonté. Le sens de nos vies sera celui que nous leur donnerons.

Étrangement, le début de l’année juive n’est pas lié à un événement spécifique à notre tradition mais à l’anniversaire (symbolique bien sûr) de la création de l’humanité. C’est donc toute l’humanité qui, d’après la tradition juive, est invitée à se redéfinir et à redéfinir sa relation au monde qui nous accueille.

Floriane CHINSKY, Docteure en Sociologie du Droit, Rabbin du MJLF

Eve, le savoir, et la dignité des femmes

Voici l’article que je viens d’écrire pour le magazine  » L’appel »… Lié à l’actualité de la lecture de la Torah autant qu’à la question de la dignité des femmes…

AIMEZ LES FEMMES COMME VOUS-MÊME

De la terre aride du déni au jardin fleuri de la collaboration

(article pour le magazine « L’Appel »)

 

Exilés de la légitimité-responsabilité

 

Accuser l’autre pour se disculper, c’est jeter des buches dans l’incendie en espérant qu’il s’éteigne.

Après qu’Adam et Eve aient goûté du fruit de l’arbre de la connaissance, Dieu les interpelle : « Où es-tu ? ». La réponse d’Adam se projette comme un réflexe défensif : « C’est Elle, la femme que TU m’as donnée, c’est ELLE qui m’en a donné et j’en ai mangé ». Qui serait coupable ? Dieu qui a donné la femme, la femme qui a donné le fruit, mais pas réellement Adam qui l’a consommé.  La femme répond pour sa part : « Le serpent m’a incitée, et j’en ai mangé. »

Au lieu d’assumer un choix difficile et d’en admettre les conséquences, le premier couple perçoit son acte comme une faute impardonnable et tente de s’en dissocier, fût-ce au prix de leur solidarité.

Ces lâchetés sont immédiatement suivies de conséquences : la bassesse, la haine, la concurrence, la douleur dans la relation filiale, dans la relation de couple, et dans le travail nourricier (Gen. 3 :14-19).

La transgression a des conséquences. Ils deviennent prisonniers de la violence qu’ils ont introduite dans le monde.

Pourquoi cela ? Aurait-il pu en être autrement ? Comment en sortir ?

 

Solidaires d’un choix réfléchi

 

L’histoire avait bien commencée : « La femme vit que l’arbre est bon pour se nourrir, qu’il suscite le désir pour les yeux, que l’arbre est agréable pour s’instruire, elle prit vite du fruit et en mangea, elle en donna à son homme qui mangea avec elle. » (Gen 3 :6)

De l’observation, de la réflexion, de l’action et du partage : la recette du paradis !

Pour nos sages la motivation de la femme n’est pas le goût du plaisir mais la recherche de l’intelligence.

Pourtant, le savoir entraine la conscience de l’ignorance. Connaitre notre pouvoir, c’est connaitre notre infinie faiblesse. Les yeux ont besoin d’un moment pour s’habituer à l’éclat du soleil et aux ombres de la nuit. Le premier couple voit plus clair, mais il perçoit également la vulnérabilité de leur condition, « ils comprirent qu’ils étaient nus ». Rachi dit : « Ils avaient un seul commandement et ils s’en sont dénudés ». Ils sont face à la réalité de leur solitude dans la prise de décision.

Ils vont devoir « s’habiller », ils se créent des vêtements végétaux, utilisent la nature pour s’en distancier, inventent un nouveau rapport au corps. Dieu lui-même les soutiendra et leur fabriquera des vêtements de peau.

 

Voir d’autres paysages

 

Plutôt que l’accusation, « la téchouva leur aurait convenue, comme David disant à Nathan : « J’ai transgressé » » (Sforno). L’aveu du secret déracine le chantage, l’aveu de la faute libère de son emprise, l’aveu de l’échec (כשל) ouvre le chemin de la raison (שכל). Laure Adler disait le 17 octobre au micro de Léa Salamé : « Il ne faut pas seulement punir, il ne faut pas employer des mots comme « punition ». Il faut employer des mots comme « civilisation », comme « reconnaissance de nos droits », comme « possibilité pour ces hommes qui ont été élevés dans la culture machiste, qui considèrent que les femmes ne sont que des trous, qu’elles sont réduites à leur sexe uniquement, et bien qu’ils considèrent que, nous les femmes, nous sommes leurs égales…” »

Il est temps qu’à la suite d’Ève, nous goutions en tant que société à l’arbre de la connaissance, de façon à ce que nos yeux s’ouvrent sur l’urgence de reconnaitre et d’assumer pleinement la dignité et la liberté des femmes. Lever la malédiction première implique d’instaurer une société de dignité et de respect, où l’humiliation ne reste pas cachée ni reléguée, où la vulnérabilité est assumée et peut trouver accueil et soin, pour la femme comme pour l’homme. Ainsi que nous le disons dans les bénédictions du matin : « Éternel, ouvre les yeux des aveugles ! Habille ceux qui sont nus ! Redresse ceux qui sont courbés !»

 

 

 

Le loup peut-il apprendre la loi ?

« La justice, la justice tu poursuivras ! »
(Deutéronome 16 :20)

Télécharger ici en PDF: la loi

Entre la réalité d’une Justice humaine imparfaite et le sacré de la Valeur Justice

La Justice est-elle encore d’actualité ?
Selon l’expression des anciens : « L’Homme est un loup pour l’Homme. » Quelle puissance pourrait donc s’opposer à la force brute ?
Le pouvoir judiciaire est cette entité, créée par l’Homme, qui endosse la responsabilité de s’opposer à lui, en s’appuyant sur une valeur édictée comme sacrée et supérieure, la Justice. Le risque que « la raison du plus fort soit toujours la meilleure » est toujours présent. Le risque de confusion entre Justice et Force est double. Le fort risque d’abord d’édicter la loi à son avantage. Il est ensuite tenté de la critiquer ou de la contourner.
Plusieurs candidats aux plus hautes fonctions de l’Etat ont illustré dramatiquement cette tendance au cours des dernières élections présidentielles françaises. Pris en défaut par la Justice, ils ont choisi de se retourner contre elle et de remettre en cause sa légitimité. Par ailleurs, en 2013, le coût annuel de l’évasion fiscale européenne était estimé à 1000 milliard d’euros par an. Avec un quart de cette somme investie pendant 15 ans, l’ONU estime que nous serions en mesure d’éradiquer la faim dans le monde entier. Le prix de la faiblesse de la Justice se compte parfois en vies humaines.

Respecter intellectuellement le Droit et obéir à la Loi

Comment la Justice peut-elle se défendre contre ces transgressions ? Sommes-nous en mesure d’agir ?
La tradition juive nous invite tout d’abord à soutenir le système judiciaire, en dépit de son imperfection. « Rabbi Hanina, suppléant du grand prêtre, disait : « Prie pour la continuité de la royauté, car sans la crainte qu’elle inspire, les hommes s’entre dévoreraient vivants ! » (Michna Avot 3 :2) La royauté ici, ce sont les institutions publiques. De la même façon, d’après le Talmud (Sanhédrin 56a), la première des 7 lois de Noé exige que chaque société humaine se dote de tribunaux. En d’autres termes ces textes nous rappellent que l’Institution Judiciaire est au cœur du Contrat Social.
Plusieurs textes de la Torah insistent sur la nécessité de l’indépendance des juges. La règle et son application doivent rester impersonnelles et générales comme le rappelle le Lévitique (19 : 15) :
« Ne prévariquez point dans l’exercice de la justice; ne montre ni ménagement au faible, ni faveur au puissant: juge ton semblable avec impartialité. » Deux tentations opposées sont mentionnées : celle de se soumettre au puissant par crainte ou par intérêt et celle de favoriser le faible par empathie . Ces deux attitudes desservent également la justice.

L’évidence de la Justice sera un jeu d’enfant
La troisième approche nous invite à examiner le rapport de force en d’autres termes. Plus puissant que lui, je pourrais être tenté d’abuser de la faiblesse de mon prochain. Mais plus puissant que moi, Dieu lui-même se tient à ses côtés. Telle est le sens de l’injonction du Lévitique (19 :14) : « N’insulte pas un sourd, et ne place pas d’obstacle sur le chemin d’un aveugle: redoute ton Dieu! Je suis l’Éternel. » Plus grande que mon intérêt personnel, ma conscience de ma solidarité à la condition humaine m’oblige. L’idée de Dieu ou celle de la suprématie de nos valeurs, nous aide à refuser l’abus de pouvoir.

La question de l’indépendance de la Justice est bien pertinente, à tous les temps. Les acteurs du présent dénoncent la coexistence d’ « Une morale pour les aigles, une autre pour les pigeons » . Notre espoir pour l’avenir est qu’au contraire « le loup habitera avec la brebis, et le tigre reposera avec le chevreau; veau, lionceau et bélier vivront ensemble, et un jeune enfant les conduira ». Selon Isaïe (11 : 6) Dans l’intervalle, il nous appartient de mettre en œuvre au mieux de nos moyens la parole du Deutéronome (16 :20) : « La Justice, la Justice tu poursuivras ! »

Liberté Égalité Fraternité – Solidarité

Alors que les élections sont à nos portes, je prends le temps de vous rappeler la définition qu’Edmond Fleg donne de la victoire:
« Lorsque, rendus dés longtemps aux fraternités des peuples, nous aurons fait avec toi, avec tous les hommes, sur toute la terre, toute la paix, dans toute la justice, alors, seulement, Éternel notre Dieu, roi du monde, assez pour nous! » Voyez également  les quelques mots très forts de Danielle Cohen, Présidente du MJLF sur ce lien.
Et de mon côté, je soumets à vos réflexions ces quelques pensées sur l’entraide, que j’ai eu la chance de partager dans le magazine l’Appel. Encore une nouvelle façon d’affirmer que toutes les dignités humaines sont égales et imprescriptibles.

La charité est-elle encore d’actualité ?

Alors que nos conditions de travail ou celles de nos proches sont parfois de plus en plus précaires, nous pouvons être tentés de nous démarquer des personnes déclassées pour entretenir l’illusion que « c’est de leur faute », et que, « puisque nous, nous sommes des gens biens », nous ne courrons pas ce type de risque.

Pourtant, selon la Bible, c’est l’attitude opposée qui peut valablement nous rassurer. Mieux vaut nous associer les uns aux autres, en mutualisant les risques :

« Si l’un d’eux tombe, son compagnon pourra le relever; mais si un homme isolé tombe, il n’y a personne d’autre pour le remettre debout. » [1]

Mais quel est précisément le sens de l’aide à autrui ? La notion de « charité » n’implique-t-elle pas une vision paternaliste qui valorise le donneur tout en rabaissant celui qui reçoit ?

Pour la loi et la conscience juive, aider son prochain peut être considéré comme un diamant à plusieurs facettes : la Guemilout Hassadim (donner des bienfaits), le Maasser (dîme) et la Tsédaka (don d’argent).

Les Pirké Avot nous enseignent que : « Le monde repose sur trois piliers : la Torah (l’étude des textes), le Avoda (la prière) et la Guemilout Hassadim. » [2] Faire du bien à son prochain a donc une portée collective, l’enjeu est en réalité le sens même de la Création.

Par ailleurs, la michna présente cette même notion de guemilout Hassadim sous un angle différent : « Voici les commandements dont nous touchons les fruits dans ce monde et dont le rayonnement se poursuit dans le monde futur: le respect de ses parents, la guemilout Hassadim, rétablir la paix entre les gens, et l’étude de la Torah équivaut à tous ces commandements. »[3] La générosité est considérée ici comme profitable à l’individu, à court et long terme[4].

Le don offre également une opportunité d’expression de notre générosité naturelle dans le cadre des « commandements qui n’a pas de mesure », une expression de notre sentiment citoyen à travers la dîme[5], une occasion de nous rassurer sur notre puissance à corriger un monde qui parfois nous échappe[6].

Les connotations condescendantes parfois associées à l’idée de « charité » ne sont donc pas adaptées à la vision juive de l’entraide.

En revanche, l’étymologie du terme renvoie au mot « chérir » en français, au mot « care » en anglais, à une attitude de soucis pour l’autre. Dans cette acception, la charité, la « Tsedaka » est comprise dans sa racine commune avec le mot « Tsédek » (justice). Donner à l’autre revient à rétablir la justice.

Celui qui donne et celui qui reçoit accomplissent ensemble le même commandement : celui de limiter les injustices dues aux aléas de la vie, celui de donner à chacun une chance réelle d’exister dignement dans la société humaine.

On raconte qu’aux temps où le Baal Chem Tov vivait de dons, il frappait aux portes pour signaler « il y a ici un nécessiteux » et passait son chemin, forçant ainsi le donneur à le poursuivre. Interpelé sur cet étrange comportement, il répondait : « J’ai fait ma part en demandant, à toi de faire la tienne en me rejoignant ! »

Cette histoire illustre le fait que nous partageons la même dignité. Le problème de la pauvreté n’est pas celui des « pauvres », mais celui de notre société dans son entier.

[1] Ecclésiaste 4 :10

[2] Michna avot 1 :2

[3] Michna péa 1 :1

[4] Pour une approche neuroscientifique, voir https://www.franceinter.fr/emissions/sur-les-epaules-de-darwin/sur-les-epaules-de-darwin-23-novembre-2013

[5] Un dixième des revenus de la collectivité est attribué aux plus pauvres  tous les trois ans Deut.26 :12

[6] « La générosité sauve de la mort » Proverbes 10 :2, Babli Chabbat 156a

L’amour est-il encore d’actualité?

appel1articleLe magazine « l’Appel » est un magazine chrétien qui s’intéresse à l’actualité et au dialogue interconvictionnel. Il m’a demandé une contribution pour les prochains mois. Voici ma contribution pour le numéro de février. Mon titre initial était « l’amour est-il encore d’actualité ».

L’un des initiateur de ce magazine est Gabriel Ringlet, avec lequel j’avais eu le plaisir de partager une cérémonie co-créée et une conférence au Prieuré Malèves Sainte Marie.

Pour télécharger l’article, cliquez sur le lien suivant: article l’appel: l’amour est-il encore d’actualité

Nous sommes le chant du monde… Dracha Tichri 5777

Chana tova à toutes et à tous! gmar hatima tova.

Floriane Chinsky

chant roch hachana chagallQuelques heures avant Kipour, je partage ma dracha de Roch Hachana et vous souhaite à toutes et à tous une excellente année 5777, gmar hatima tova.

Un an encore a passé. 365 jours. 8760 heures. 525 600 minutes. Plus de 30 millions de secondes.

Un trésor précieux entre tous, de temps, de la vie, la vie.

Qu’avons-nous fait de ces instants ? Qu’avons-nous créé ? Qu’avons-nous pensé ? Que sommes-nous devenus ? Ces instants ne reviendront jamais.

Ce jour de roch hachana est le jour des comptes, le grand jour de la comptabilité de nos actions.

Reprenons chacune de nos secondes et voyons dans quelle colonne nous l’inscrivons.

Nos colères, où s’inscriront-elles ? Nos joies ? Nos satisfactions ? Nos frustrations ? Nos repos ? Tous ces sentiments légitimes, dont nous sommes les bergers et bergères ?

Dans quelle colonne s’inscriront-ils ?

Cette colère-là, était-elle un investissement ? un gâchis ? un apprentissage ? une nourriture émotionnelle ? un tremplin pour évoluer ? une nécessité périmée ?

Cette…

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Les voyages et leurs bénéfices virtuels (Paracha Massaé) (ou: Pokemon et plus encore!)

Je partage cette petite Dracha composée spécialement Chabbat dernier à l’occasion de mon passage au GIL, la synagogue libérale de Genève.

Dans le texte que nous venons de lire dans le sidour, il est question de voyages. Le voyage dans l’espace et le voyage dans le temps. Puisque nous disons que les voyages forment la jeunesse, il est intéressant de se demander en quoi ils nous aident à évoluer. Cette question est présente non seulement dans la Torah mais aussi dans toute l’histoire juive ; en effet, notre expérience en tant que peuple couvre  de vastes espaces dans l’histoire autant que dans la géographie. Cette même question se pose à chacun d’entre nous, lorsque nous traversons les différents âges de la vie, chaque fois que nous rencontrons des situations et des personnes nouvelles.

Pour moi qui suis justement en visite dans cette belle synagogue de Genève, la question est très présente. Je mesure également le temps écoulé depuis ma brève visite au moment de son inauguration, il y a un peu plus de 6 ans.

Et la question du voyage est à mes yeux apparentée la question de l’identité.

Le GIL ressemble beaucoup au MJLF, il est évident que nous sommes frères, que nous sommes de la même famille. Pourtant, il existe des nuances, des variantes plus ou moins perceptibles au niveau des pratiques et au niveau des airs. Ces différences m’interrogent. Où est la limite entre ce que j’identifie comme « semblable » et ce que j’identifie comme « différent ».

La question est pertinente aujourd’hui à différents niveaux, et on peut se demander si les identités religieuses par exemple nous rapprochent ou nous séparent. On peut se demander si les identités nationales nous rapprochent ou nous séparent.

Au-delà des éléments « objectifs » qui font notre ressemblance et notre différence, une autre chose compte encore plus : la façon dont nous répertorions ces différences. Les classons-nous dans la catégorie « un peu différentes mais nous sommes frères » ou dans la catégorie « pas mal différentes et nous sommes étrangers » ? Plus que la réalité, c’est notre lecture de la réalité qui fait la différence.

Alors que notre paracha parle justement de voyages, nous pouvons mentionner la très belle formule de Alfred Korzybski (mathématicien, ingénieur et philosophe) : « La carte n’est pas le territoire ». Il ne faut pas confondre la réalité et l’idée que nous nous en faisons.

Un texte de Lewis Carroll illustre cela avec beaucoup de fantaisie et de justesse :

« « C´est une autre chose que nous avons apprise de votre Nation, » dit Mein Herr, « la cartographie. Mais nous l´avons menée beaucoup plus loin que vous. Selon vous, à quelle échelle une carte détaillée est-elle réellement utile ? »

« Environ six pouces pour un mile. »

« Six pouces seulement ! » s´exclama Mein Herr. « Nous sommes rapidement parvenus à six yards pour un mile. Et puis est venue l´idée la plus grandiose de toutes. En fait, nous avons réalisé une carte du pays, à l´échelle d´un mile pour un mile  ! »

« L´avez-vous beaucoup utilisée  ? » demandai-je.

« Elle n´a jamais été dépliée jusqu´à présent », dit Mein Herr. « Les fermiers ont protesté : ils ont dit qu´elle allait couvrir tout le pays et cacher le soleil  ! Aussi nous utilisons maintenant le pays lui-même, comme sa propre carte, et je vous assure que cela convient presque aussi bien. »

Ainsi, il est simple de confondre le territoire et sa carte, le réel et la signification que nous lui donnons. Mais ce serait une erreur. La sentence de Korzybski bien sur métaphorique, comme l’histoire de Lewis Caroll.

Notre paracha de la semaine, Massaé, retrace le déplacement des enfants d’Israël pendant les 40 ans du désert. Pourquoi ce « retour sur carte » ? Pour Rachi, ce récapitulatif est fondamental. Il permet non seulement de rappeler les détails pratiques de l’histoire, mais surtout de leur donner un sens. Chaque aventure est un enseignement qui doit être pris en compte.

Nous nous rappelons que les 40 ans d’errance dans le désert sont liés au refus des enfants d’Israël d’entrer en terre de Canaan. On pourrait penser que ces 40 ans auraient eu un caractère punitif. Rachi souligne au contraire la bienveillance permanente de Dieu. Sur les 42 étapes, 22 se sont déroulées pendant la première et la dernière année. Les 20 restantes ont donc permis de longues pauses, de deux ans en moyenne, laissant ainsi aux enfants d’Israël le temps de s’installer, de se poser. Ce récapitulatif est une déclaration d’amour. Rachi mentionne la parabole des sages, comparant cela à l’histoire de ce roi qui a voyagé avec son fils malade. Une fois celui-ci sorti de sa fièvre, le roi tient à lui redonner conscience des chemins qu’il a parcourus dans un demi sommeil : « Ici nous avons dormi, ici nous nous sommes rafraîchis, ici tu as eu des maux de tête, etc. »

De même, les péripéties de nos vies ont un sens, au-delà de leur simple « cartographie », et il nous appartient de nous en saisir.

En ces temps de furie de « Pokémon Go », une petite comparaison estivale peut nous permettre de dire qu’au-delà de la réalité matérielle, il existe une réalité virtuelle, y a toujours un « Pokémon » ou un « cadeau virtuel » dont nous pouvons nous saisir si nous prenons la peine de le voir.

Ainsi, lorsque nous prenons la peine de voir plus loin que la « carte » pré-écrite dans nos têtes, nous pouvons saisir les cadeaux que nous offrent les expériences de la vie, les voyages se mettent à former notre jeunesse, nous apprenons beaucoup des ressemblances et des différences de l’autre. Dans la confrontation à la vie et à l’autre, nous apprenons à mieux connaitre notre identité propre.

Le Rabbin Garaï soulignait la semaine dernière notre capacité en tant que juifs libéraux de ne pas nous identifier à notre tradition de façon fondamentaliste, mais à adopter parfois un regard distant qui permet la réflexion. Tel est également l’un des enseignements de notre Paracha. Que nous gardions toujours cette capacité de distanciation et de réinterprétation du réel, en particulier en ce jour de repos qu’est ce beau chabbat que nous partageons.

Chabbat Chalom

Seder express: pour préparer son seder familial

Une vidéo et une mini hagada pour se lancer pour un seder familial à la maison…

Floriane Chinsky

Bonjour à toutes et à tous,

Faire le seder chez soi est une expérience extraordinaire.
On peut y passer toute la nuit, comme Rabbi Akiva, Rabbi Tarfon, Rabbi Eleazar ben Azaria and co., en rajoutant des questions d’actualité (dans quels pays se bat-on aujourd’hui pour la liberté?), des questions éternelles et philosophiques (qu’est-ce que la liberté? la liberté politique? la liberté de se changer soi-même? comment peut-on l’atteindre? etc….), ou de nombreux chants.
On peut aussi faire des versions simplifiées qui permettent de se lancer pour un premier seder et de mettre le seder à la portée des enfants.
Pour cela, nous avons préparé pour vous deux outils: Une hagada courte et très simplifiée que vous pouvez télécharger ici:
hagada simplissime à télécharger
Une vidéo qui vous montre comment utiliser cette hagada et comment apprendre les chants:

Bonne lecture, bonne écoute, et bon seder.
Ce vendredi à 18h45, office abrégé…

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